Les Paix en conflit ?

Colloque de lancement de l’Institut Pour la Paix

20 et 21 octobre 2022 à ESPOL

L’étude des guerres, des conflits et des violences est établie de longue date dans le paysage de la recherche française et francophone. Les thématiques de la « sortie de guerres », du « peace building/enforcement », ou celles liées aux difficultés croissantes à distinguer clairement entre état de guerre et état de paix sont en plein essor depuis quelques années, comme en témoigne la création de filières universitaires telles que les parcours de Master sur la paix à Paris-Dauphine et Sciences Po Lille, le DU Intervention civile de Paix à l’Institut Catholique de Paris, et quelques initiatives plus ciblées à l’Institut Catholique de Lille avec la Masterclasse Global Actors for Peace de la Faculté libre de Droit, et au sein du Master International and Security Politics d’ESPOL, ou à l’Université de Caen avec la Chaire Normandie pour la Paix. Plus récemment encore, la thématique de la paix a fait son entrée sur la scène politique : avec des initiatives telles que le Forum mondial Normandie pour la paix et le Forum de Paris sur la paix.

Le surgissement du thème de la paix, aussi bien dans le champ savant que dans l’espace public, n’est pas due au hasard et s’insère dans un faisceau d’expériences qui, sans être nécessairement liées entre elles, contribuent à brouiller un certain nombre de repères conceptuels et politiques. On peut penser aux échecs des interventions occidentales et des projets de nation building libéral ou encore à la crise actuelle de la construction européenne. On soulignera aussi les difficultés à distinguer clairement entre guerre et paix et donc entre sécurité extérieure et intérieure, sans omettre les défis soulevés par ce que certains appellent les « nouvelles guerres » et la lutte contre le « terrorisme »; le retour de la « guerre » en Europe en 2022 ne faisant qu’ajouter à la confusion.

De ce point de vue, et malgré la présence grandissante de la thématique de la paix dans les débats savants et politiques, la France fait figure d’exception puisque les études de paix – qui font partie intégrante du paysage institutionnel et académique dans beaucoup de pays depuis de nombreuses décennies – n’y ont jamais connu une véritable institutionnalisation. De nombreux textes, pourtant importants, ne sont ainsi pas disponibles en français et une bonne partie des approches et des outils conceptuels développés dans le giron des peace studies demeure peu connue en France. La recherche et le débat français peinent souvent à puiser dans le réservoir d’expériences multiples – ainsi que d’échecs – des peace studies : d’une approche positiviste dominante dans les années 1950, à une politisation croissante pendant la décennie suivante, de la diversification entre approches « traditionnelles » et « critiques » de la paix depuis les années 1970 et 1980 au décentrement global des points de vue en lien avec les débats sur la globalisation des années 1990, de la crise des peace studies avec la fin de la guerre froide aux défis posés par de « nouvelles » formes de violence internationale depuis les années 2000 au « retour de la grande guerre » sur le sol européen… Les opportunités n’ont pourtant pas manqué pour construire une pensée renouvelée de la paix dans ses rapports à la guerre et aux violences.

Partant de ce constat, l’Institut Pour la Paix se propose d’accueillir et de soutenir une recherche plurielle et interdisciplinaire dans le but de faciliter l’institutionnalisation des peace studies dans le contexte français. Dans cet objectif, l’IPP accompagne des réflexions sur la paix et le genre, sur les concepts de paix, sur la paix, le conflit et l’environnement ainsi sur les sens de la paix en Afrique et en Amérique latine afin de contribuer au renouvellement des approches sur la paix, tout en se constituant comme plateforme de dialogue avec la société civile et l’action publique.

Programme complet

Jeudi 20 octobre 2022

09h45 – 10h30 | Allocution de bienvenue et introduction

Alexis Massart, ESPOL – ICL

Thomas Hippler, Université de Caen – HisTeMé
Philippe Bonditti, ESPOL – ICL

10h45 – 12h30 | Savoirs de paix, conflits et stratégie

Présidence : Grégory Daho, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

L’utopie ou la non-guerre : études sur la paix et de sécurité pendant la guerre froide
Christophe Wasinski, ULB – REPI

Plus la paix, pas tout à fait la guerre : enjeux juridiques de l’identification du conflit armé
Sarah Cassella, Université Paris Cité

Contre la paix
Peter Burgess, ENS – Chaire de Géopolitique du risque

14h00 – 15h30 | Réconciliation, mémoires, justice

Présidence : Pierre-Yves Néron, ESPOL – ICL

Accomplir la paix ou y résister: écrire son histoire
Laetitia Bucaille, INALCO

La justice face à la violence politique
Sandrine Lefranc, CNRS-Sciences Po Paris et Antoine Megie, Université de Rouen

La fragmentation des mémoires : obstacle ou opportunité pour la paix ?
Eric Sangar, Sciences Po Lille

16h00 – 18h30 | Groupes de travail

Présidence : Thomas Hippler et Philippe Bonditti

Paix et Genre
Valérie Pouzol, Université Paris 8 – UMR LEGS, et Camille Boutron, IRSEM

Approches régionales : Afrique et Amérique latine
Laura Lema Silva, Institut Pour la Paix, et Raphaël Porteilla, Université de Dijon

Concepts de paix
Benjamin Bourcier, ESPOL – ICL, et Thomas Hippler

Paix, conflit et environnement
Nadia Belaïdi, CNRS – MNHN, et Philippe Bonditti

Vendredi 21 octobre 2022

09h00 – 10h30 | Négociation, médiations, altérités

Présidence : Gilles Ferragu, Université Nanterre et SHD

Penser la pacification internationale par les médiations
Milena Dieckhoff, Université Clermont Auvergne

La dissuasion empathique à l’épreuve de la crise ukrainienne 2022
Thomas Lindemann, USQV et Polytechnique

Diplomaties musicales: et si la paix était aussi acoustique?
Frédéric Ramel, Sciences Po Paris

11h00 – 12h30 | Leviers de la pacification

Présidence : Laura Lema Silva, Institut Pour la Paix

Les causes économiques des conflits
Mathieu Couttenier, ENS de Lyon et CEPR

Pacification et action de secours : une cohabitation qui ne va pas de soi
Michaël Neuman, CRASH – Fondation Médecins Sans Frontières

Les échecs de la pacification par la force en Afrique: le cas du Sahel
Marc-Antoine Pérouse de Montclos, IRD

14h00 – 15h00 | Guerre, paix, violence

Présidence: Isabelle Delpla, Université Lyon 3

Efficience et paix : équilibrer la charge de la preuve
Cécile Dubernet, Institut Catholique de Paris

Grands débats dans un petit monde. Bis repetita.
Didier Bigo, Sciences Po Paris et Kings College London

15h30 – 17h00 | Allocution de conclusion

Quand et comment serons-nous en paix? Réflexions au milieu de la guerre
Étienne Balibar, Professeur émérite, Université Paris Nanterre